.Libre Comme L'Air & Rapide Comme L'Eclair. [L]

. Dès mon arrivée ici, mes membres se faisant chatouiller par les hautes herbes, je su que cet endroit allait me plaire. Beaucoup me plaire. Trottinant comme un arabe, que je n'étais pas, je traçais mon chemin au milieu de ces pousses d'or semblables à du blé. Le soleil était haut dans le ciel. Je m'arrêta, mes crins virevoltant. Mon regard enfantin se posa sur l'étendue qui s'étalait devant moi comme une carte encore inachevée. J'huma l'air jusqu'au plus profond de moi... Et m'élança. Le noir de ma robe semblait étinceler. Il devenait d'un sombre profond, mais pourtant pas obscur. Quant au blanc, il était presque aveuglant, se gorgeant des brûlants rayons de l'astre. Les herbes folles s'écartaient sur mon chemin, aussi frêles que des brindilles face à une tempête. Mon toupet couleur charbon s'agitait au vent, comme s'il voulait fuir & ne pas regarder l'horizon en face. Ma crinière, blanche pour elle, se faisait doucement traîner en arrière, courrant sur mon encolure tachetée. Un grand sourire ornait mes lèvres. Je leva mon regard enjoué vers le soleil qui dansait au-dessus de moi. J'accéléra, comme dans une course avec lui...

Un rêve... J'étais dans un rêve. Je n'arrivai toujours pas à réaliser ce que j'étais devenu. Et pourtant, tout était bien réel. Mes sensations me le prouvaient, et j'avais la certitude que tout ce qui se passait n'était pas que le fruit d'un rêve éphémère. Et pourtant, j'avais à la fois tant de mal à me convaincre. La possibilité d'avoir une nouvelle vie comme ça, toute nouvelle m'emplissait de joie, et aussi de questions. Pourquoi, comment c'était arrivé, pourquoi moi, et plein d'autres... Pourtant j'étais bien ici et je ne voulais pas quitter cet endroit.
Je levai la tête et détailla l'endroit où mes sabots m'avaient menés. Je découvrit une immense plaine. Mon coeur rata un battement, avant de se mettre à battre la chamade. Cette grande étendue d'herbe qui s'étalait devant moi semblait m'inviter à venir y galoper. L'envie qui s'empara de moi à cet instant fut si forte... plus qu'une envie, c'était un désir. Un rêve.
Je ne pu que céder à la tentation. Je me mit à galoper du plus vite que je pu. Je sentai le vent siffler à mes oreilles, ma crinière virevoltait, mes sabots frappaient le sol pour me propulser toujours plus loin, toujours plus vite. J'avais envie de rire, je me sentait dans un bonheur indicible.
Et c'est à ce moment que je commença à ralentir, avant de m'arrêter. Pas très loin, il y avait un autre cheval, qui courait tellement vite... Je le regardai un petit sourire aux lèvres. Il avait l'air de bien s'amuser, d'adorer galoper comme un fou... Je me demandai si j'avais la même allure quand je m'étais défoulé un peu avant. Bah peu importe. Je continuai de le regarder courir, me demandait si je devai aller le voir ou pas... Mais je ne savais pas vraiment quoi faire. Alors je continuais à la regarder galoper si vite qu'on aurait cru qu'il avait des ailes...

. J

« Bonjour ! Je suis Silent Rain. »

Majestueux. Cet étalon était majestueux. C'était le seul mot qui me venait à l'esprit pour le décrire. Je l'observais, fasciné par sa course avec le soleil. Lorsqu'il s'arréta, j'en fut plus que surpris, je me demandai pourquoi il s'était stoppé. J'espérais que ce n'était pas à cause de mon irruption soudaine ici, qu'il n'en avait pas eu marre de se sentir observé. Cependant quand il vint vers moi, ce fut d'une démarche enjouée. Non, ce n'était sûrement pas ça alors, il aurait été plus en colère sinon, enfin moins joyeux.
Je l'observais tandis qu'il se dirigeait vers moi. Il avait vraiment une très belle robe, une belle crinière. C'est à ce moment-là que je me rendis compte qu'en fait, à part lui, je n'avais vu personne d'autre, enfin aucun autre être vivant, cheval ou pas. Est-il comme moi ? Cette question me torturait l'esprit. Est-ce que c'était un simple étalon, ou est-ce qu'il était anciennement humain, comme moi ? A le voir, vu comment il avait eu l'air de s'éclater en galopant ainsi, il était sûrement pareil... Alors je n'était pas le seul à vivre cet évènement inexplicable. Et j'en était plus content que déçu. Si j'avais été seul, est-ce que j'aurai réussi à paraître normal, enfin... A dire vrai, je ne connaissais rien aux chevaux avant d'être dans ce corps. Maintenant j'en sais juste certaines choses encore... enfin peu importe. Je chassai ces pensées embrouillantes et levai les yeux vers l'étalon qui était à présent juste en face de moi.

- Euh... salut, moi c'est Ephemeral Dream.

J'avais un peu hésité avant de parler, enfin de lui répondre. Comme si je m'était demandé "c'est à moi qu'il parle ?" alors que ça ne pouvait être que moi, il n'y avait personne autour excépté nous deux. J'esquissai un petit sourire, observant de plus près l'étalon, qui avait vraiment une belle robe. J'étais content de cette première rencontre...

. J

« Dis-moi... Ephe', ça te dirait de galoper ? C'est tellement bon de sentir le vent dans ses crins, de se sentir libre comme jamais et de... enfin voilà quoi... ! »

. J

Après que j'eu dit mon nom, un silence succéda à mes paroles. Je continuais d'observer l'étalon. Sa robe tachetée était si belle, et lui allait si bien. Un ensemble de contraste. C'est à ce moment là que je me dis qu'en fait, son nom était beau mais ne lui convenait pas tant que ça. Enfin, je ne le connaissait pas encore alors je ne pouvais en être sûr. Mais d'après ce que je voyai, cet air enfantin et joyeux contrastait avec ce nom... triste. De même que sa robe contrastait noir et blanc. Je souris en songeant à tout ça.
Silent Rain avait l'air lui aussi dans ses pensées, et le vol d'un corbeau sembla le ramener sur terre. Et c'est alors qu'il me proposa de galoper. Je fut surpris par cette demande. Je n'avais jamais pensé qu'on aurait pu me demander ça, à moi. Et pourtant, cette surprise se transforma en un sourire. J'était content de cette proposition. Et puis j'eus un petit rire. Oui... cela me faisait rire de le voir commencer à décrire ces sensations, et puis s'arrêter avant de se lancer dans un discours qui, je m'en doutait, pourrait durer longtemps tellement il avait l'air passioné. Pour moi, ces sensations étaient indéfinissables, il faut les vivre pour les comprendre. Mais je voyait parfaitement de quoi voulait parler Silent Rain. Je levai les yeux vers les siens et lui sourit. Bien sûr, ce serait avec joie. On ne peut louper une occasion pareil.

- Oui !

Là-dessus, on avait l'air d'être sur la même longueur d'onde. Je souris en pensant à ça. Décidemment cette nouvelle vie n'était faite que d'avantages, pour moi. Et je m'en réjouissait. J'avais décidé de laisser totalement tomber le passé, de vivre ici et maintenant. De profiter de cette deuxième vie. De profiter de la liberté. Je secoua ma crinière et m'approcha un peu plus de lui, comme pour se mettre sur une ligne de départ. Comme une course. Une course avec le vent... Ou peut-être simplement pour galoper à côté de lui. J'était impatient d'essayer. Jusqu'à maintenant, enfin plutôt depuis que j'étais ici, j'était resté seul, profitant de cette vie, de cette liberté, tout seul, en solitaire. Mais voilà que maintenant, j'avais envie de galoper avec quelqu'un. Et cette envie me surprenait. Moi qui avait du mal à me rapprocher des gens normalement. Bah, après tout ici on n'est plus... là-bas. Ici, il n'y a que des chevaux, enfin des chevaux comme moi, et puis peut-être d'autres animaux. Et ici, je ne peux pas croire qu'il y en ai des mal intentionnés. Enfin peu importe. Je chassai toutes ces idées.
Pour l'instant, il n'y avait que Silent Rain avec moi. Et à ce moment il me donnait envie de galoper avec lui. Alors c'est tout ce qui comptait pour le moment. Je lui souris, comme attendant le signal de départ.

. S

ur la même longueur d'ondes. Voilà ce à quoi je pensais moi aussi. Quelqu'un qui me ressemblait. Qui me comprenait. Qui deviendrait un ami. Un allié. Quelqu'un avec qui la course ne serait pas un défi, mais une liberté. On dit que le dernier mot de la liberté, c'est l'égoïsme. Pourtant, le premier mot de l'égoïsme, c'est pourtant de penser aux autres, pour pouvoir être égoïste ! Alors, la liberté pouvait très bien se partager. Se mêler. Je souriais toujours, comme si mon sourire figé s'était installé pour toujours. Il se plaça près de moi une fois qu'il eut - à ma grande joie - accepté. Je me cabra doucement, battant l'air de mes antérieurs aux teintes mélangées. Mes crins s'envolaient. Eux aussi voulaient être libres. Et c'est moi qui leur fournirait cette dose de liberté. Je secoua l'encolure, toujours en l'air, et hennis. Un hennissement clair & joyeux qui résonna longtemps dans ma tête, et peut-être aussi à l'extérieur de celle-ci. Je n'étais resté que quelques secondes cabré, mais j'avais l'impression que le temps s'était arrêté. Alors, d'un bond, je me tourna vers Ephemeral Dream. L'étalon que je voyais déjà presque comme un frère. L'étalon qui pouvait devenir mon frère de meute, mon frère de clan. Un frère que je n'avais jamais eu, même avant. D'un second bond, redressant fièrement la tête, je m'élança alors. Le corbeau qui m'avait sortit de mes pensées revint brutalement, volant au-dessus de nous. Mes foulées étaient rapides & agiles. Je ne pouvais jeter un coup d'oeil au frison, même pour savoir s'il était partit. Non, mon regard enjoué était fixé loin devant moi. Entravant l'horizon de ma vision enfantine & toujours gaie. Chaleureuse. Alors, j'accéléra encore. Je frappais le sol, mais celui-ci ne semblait pas m'en vouloir. Au contraire, il semblait me pousser. Me donner la force d'aller plus loin. Plus vite. Toujours. Les herbes dorées s'écartaient sur mon chemin, & mon poitrail forçait le passage à celles qui ne le voulaient pas. Le corbeau poussa son « Crôaa » habituel & je leva les yeux vers lui, toujours souriant. J'inspira à fond l'air. L'air emplie du goût de la liberté que m'offrait cette course folle. Cette course avec le vent comme allié & le soleil comme rival. C'était tellement bon que j'aurais voulu que ça dure pour l'éternité. Toujours. Un nouveau regard vers le corbeau, dont ses ailes noire & longues fouettaient le vent avec vivacité pour nous suivre. Moi aussi je voulais voler...

Ca y est, Silent Rain était partit. Je poussa un long hénissement. Sans raison, juste parce que j'en avais envie... Un sourire s'imprégna sur mes lèvres et je bondit en avant. C'est partit pour la course folle ! J'observais Silent Rain galoper, devant moi, accélérant un peu pour le rattraper, puis je dévia mon regard pour fixer l'horizon. Si lointain. Bien que je galopait vite il semblait toujours aussi loin. Définitivement loin. Comme un lieu infranchissable. Comme un rêve qui s'échappe dès qu'on essaye de le saisir. Et ici, c'était une vaste plaine où il n'y avait pas de fin, peut-être, on aurait crû. Et j'aimais ça. Galoper sans s'arrêter. Pour aller où ? Nulle part. Juste pour galoper.
J'accélérai, galopant de plus en plus vite. Je filai comme le vent, non, j'avais la sensation d'être devenu le vent. Comme si mon corps de cheval m'avait quitté, comme si mon esprit l'avait abandonné pour se mêler au vent, pour se fondre dans l'air. Et pourtant, c'était paradoxal. Car je sentait bien mon corps, je le sentait même étonnement bien. A chaques fois que mes sabots se posaient sur le sol, je ressentait les vibrations dans mon corps entier. A chaque foulée que je faisais, à chaque respiration, à chaque sourir, je sentait mon corps en mouvement, je sentais mes muscles en action, contractés et m'aidant au mieux dans cet effort. J'avais le sentiment que mon corps et mon exprit ne faisaient qu'un. Les yeux toujours fixés sur l'horizon, je savourais cet instant de liberté, de joie. J'avais envie de courrir pour l'éternité, sans que jamais je puisse m'arrêter. Sans que jamais je ne songes à abandonner. Tout simplement, je voulais continuer de galoper.
Accélérant encore, je me rendis alors compte que quelque chose était à la même allure que moi, et au lieu de le voir disparaître derrière moi restait dans mon champs de vision. Je tournais la tête. C'était Silent Rain. Je souris, et reportai à nouveau mon regard devant moi. Puis levant les yeux je regardai le ciel. Immense. Les quelques nuages qui parraissaient dans le ciel semblait observer cette course. De même que le soleil. Haut dans le ciel, il rayonnait fort (x3). Comme heureux de cette situation. Il semblait ne presque pas bouger, fixé dans cette immensité bleue. Non, pas fixé... plutôt comme s'il bougeait, courrait dans le ciel lui aussi. Pour ne pas se laisser distancer. Pour participer et galoper avec nous. Je baissai la tête, heureux. Cet instant appartenait à moi seul. Non, en fait. Plutôt à nous seuls. Silent Rain, le soleil, et moi. Un sentiment de bonheur, une euphorie incomparable m'envahissait tandis que je galopait toujours plus vite.

. J

» Flood n°1 || Le flood c'est comme le NUTELLA ... sans modération 8)